ANTIBIOTIQUE DANS NOS ELEVAGES ??? DES TONNES D'ANTIBIOTIQUES POUR LES ANIMAUX PREVENTIVEMENT ???
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Viande :
Après les hormones,
les antibiotiques?
Les antibiotiques possèdent la propriété étonnante d'accélérer la croissance, et sont ainsi utilisés massivement dans l'élevage.
Si 24 kg de l'antibiotique vancomycine ont été prescrits au Danemark en médecine humaine en 1994, ce sont 24 000 kg de son homologue pour l'animal, l'avoparcine, qui furent utilisés dans la même année. Cet usage pourrait favoriser la résistance à un médicament pourtant développé pour faire face aux bactéries résistantes, et souvent utilisé comme arme de la dernière chance dans les hôpitaux. L'Union européenne doit décider avant le 1er janvier prochain si elle interdit ou non les antibiotiques dans l'alimentation animale.
Dans les élevages, les antibiotiques ont trois usages : curatif, préventif et additif. Ils servent tout d'abord à soigner les animaux malades. Ainsi, une vache souffrant d'une mammite (infection du pis) doit être traitée avec un antibiotique, prescrit par un vétérinaire. Ensuite, les antibiotiques sont utilisés de façon préventive.
Lorsque dans un élevage quelques individus meurent d'une infection bactérienne contagieuse,
le vétérinaire traite tous les autres animaux aux antibiotiques.
Enfin, et c'est là le noeud du problème, des antibiotiques sont ajoutés en doses très faibles aux aliments des animaux sains. Ce sont des additifs alimentaires, utilisés le plus légalement du monde comme facteurs de croissance.
En France, pratiquement tous les cochons, tous les dindons, tous les veaux, deux poulets sur trois, et un tiers des bovins à viande reçoivent des aliments supplémentés par des additifs antibiotiques. Seuls les élevages répondant aux critères de l'agriculture biologique et les productions sous label n'utilisent pas d'additifs.
Dans d'autres pays, ils sont peu utilisés (en Finlande par exemple), ou même pas du tout (Suède)(1).
Ces additifs sont des produits étonnants : les animaux qui en reçoivent ont besoin de manger moins pour produire autant : l'indice de consommation* s'améliore de 3 à 12 %. Cette économie d'aliment représente à peu près le revenu de l'éleveur.
De plus, les animaux croissent un peu plus vite (le gain moyen quotidien* augmente de 3 à 9 %), et les lots d'animaux sont plus homogènes.
Pourquoi ? Il semble que ces petites doses d'antibiotiques inhibent le métabolisme de la flore bactérienne intestinale des animaux. Ces bactéries consomment moins de nutriments (acides aminés) et produisent moins de molécules toxiques (ammoniaque et amines). L'animal gagne donc sur les deux tableaux, nutrition et toxicité. L'éleveur y gagne au niveau financier.
Cependant les bactéries des animaux, comme celles des hommes, apprennent à résister aux antibiotiques.
Les premiers antibiotiques utilisés comme additifs pour les animaux le furent vers 1950.
Dix ans après, on détectait déjà des bactéries résistantes dans les élevages.
En 1969, un rapport officiel britannique, le rapport Swann, attira l'attention sur ce problème(2).
On risquait de sélectionner chez les animaux des bactéries résistantes qui passeraient chez l'homme,
que l'on ne pourrait alors plus soigner.
Du coup, dans toute la Communauté européenne on décida d'interdire aux élevages les antibiotiques utilisés chez l'homme. Les seuls additifs autorisés furent des produits très différents des médicaments, et les doses utilisées cent fois plus faibles que celles administrées en thérapie humaine (environ 20 ppm, parties par million d'aliment, soit 20 g/t).
A l'époque, cette dichotomie entre élevages et hôpitaux fut considérée comme un énorme progrès du moins pour les Européens : elle ne fut pas appliquée aux Etats-Unis où tétracycline et pénicilline sont toujours ajoutées aux aliments des animaux sains.
Ces règles devaient nous préserver des résistances liées aux additifs utilisés par les éleveurs.
Mais c'était sans compter sur deux problèmes majeurs.
Le premier, c'est que le gène qui code la résistance à un antibiotique est souvent associé à d'autres gènes de résistance sur des petites molécules d'ADN indépendantes, appelées plasmides.
On a ainsi trouvé au Japon un plasmide portant, avec la résistance au carbadox (un additif), la résistance à six autres antibiotiques(3).
L'utilisation d'antibiotiques, même différents de ceux utilisés en clinique humaine, peut donc malgré tout favoriser l'émergence d'une résistance contre ceux-ci.
Le second problème, c'est qu'on utilise désormais en médecine humaine des molécules nouvelles très proches de ces additifs.
Les nouvelles molécules sont nécessaires car les traitements ont favorisé l'apparition de bactéries qui résistent à pratiquement tout, dans les hôpitaux notamment.
De plus, on garde en vie des malades très fragiles : cancéreux, immunodéprimés, accidentés dans les unités de soins intensifs, etc. Sans défense, ils sont facilement infectés par des germes opportunistes de leur propre flore (intestinale ou cutanée) : des germes peu pathogènes, mais souvent résistants à beaucoup d'antibiotiques. On a donc besoin de médicaments nouveaux. Certains ont été trouvés dans les familles des vieux additifs.
Le meilleur exemple est celui de l'avoparcine et de la vancomycine, de la famille des glycopeptides.
L'avoparcine est utilisée comme additif alimentaire pour les animaux depuis plus de vingt ans.
Poulets et porcs poussent plus vite, mieux, en mangeant moins.
Les vaches produisent davantage de lait.
Mais en 1996 les Danois tirent la sonnette d'alarme, et interdisent l'avoparcine dans leur pays : ils démontrent qu'elle favorise l'apparition de résistances dans les élevages(4).
Le danger provient du fait qu'un produit similaire, la vancomycine, est utilisé dans les hôpitaux, et qu'une bactérie qui résiste à l'une résiste aussi à l'autre.
Or cette vancomycine est le médicament de la dernière chance pour des patients infectés par des bactéries qui résistent à tous les autres antibiotiques, certaines souches de Enterococcus faecalis et Staphylococcus aureus .
D'où le drame quand ces bactéries résistent, en plus, à la vancomycine. Malheureusement, ces résistances sont de plus en plus fréquentes. Dans les hôpitaux de New York environ 20 % des entérocoques résistent à la vancomycine, et tuent le patient infecté une fois sur trois. On vient par ailleurs de détecter, pour la première fois, un staphylocoque qui résiste à la vancomycine.
C'est ce qui conduit la Commission européenne, après d'âpres débats, à « suspendre » l'utilisation d'avoparcine en avril 1997.
On comprend bien qu'il y a un danger réel à partir du moment où les gènes de résistance peuvent passer des animaux aux hommes. Or ce passage est pratiquement démontré dans le cas de la résistance à une certaine catégorie d'antibiotiques, les fluoroquinolones.
Ainsi, aux Pays-Bas, les éleveurs de dindes ont dans leur intestin beaucoup plus de bactéries résistantes aux fluoroquinolones que les habitants des villes(5).
Dans un rapport daté du 9 juin 1998, l'Organisation mondiale de la santé souligne l'émergence de salmonelles et de C ampylobacter résistantes chez l'homme, suite à l'introduction des fluoroquinolones en élevage.
Expérimentalement, Stuart Levy a démontré le transfert d'une bactérie résistante depuis un veau à la famille de l'éleveur, dans une ferme près de Boston.
D'autres exemples ont été donnés à la réunion de la Société française de microbiologie à l'Institut Pasteur en décembre 1997(6). Mais, dans le cas précis de l'avoparcine et de la vancomycine, l'origine du passage ne semble pas claire.
Une enquête française trouve des entérocoques résistant à la vancomycine dans 25 à 50 % des viandes(7).
Cependant, ces bactéries sont, en général, différentes de celles retrouvées chez l'homme. Les travaux présentés à Toronto en octobre 1997 montrent que ni les bactéries, ni les gènes de résistance ne sont les mêmes chez l'homme et le poulet(8).
Des travaux allemands, plus anciens, vont dans le même sens.
Seule une étude, aux Pays-Bas, montre l'identité des gènes de résistance des bactéries des dindes et de leur éleveur(9).
Il semble donc que la grande majorité des bactéries qui résistent à la vancomycine dans les hôpitaux ait été sélectionnée par son utilisation en thérapeutique humaine.
Une idée renforcée par le fait qu'aux Etats-Unis, l'avoparcine n'a jamais été utilisée comme additif. C'est pourtant le pays où il y a le plus de résistance à la vancomycine en milieu hospitalier.
Comment les gènes de résistance peuvent-ils passer d'une flore bactérienne à une autre ?
Essentiellement par le biais de la chaîne alimentaire. Un grand nombre de bactéries, dont les entérobactéries, et notamment Escherichia coli , prolifèrent dans le tube digestif des vertébrés, et se retrouvent dans leurs excréments, pour ensuite contaminer les eaux usées, les sols, et éventuellement nos assiettes pour peu que les mesures d'hygiène les plus strictes ne soient pas respectées.
Un deuxième mode de contamination est la consommation directe.
Des bactéries présentes dans la viande ou les oeufs peuvent survivre à la cuisson (surtout si celle-ci est incomplète),
et parvenir jusqu'à notre tube digestif.
Elles y survivront éventuellement quelque temps, voire s'y développeront (c'est l'origine des infections alimentaires, comme les gastro-entérites par exemple).
Même si le phénomène est rare, il existe un risque non négligeable à l'échelle de la population. Une fois en contact avec les autres bactéries du tube digestif, elles peuvent leur transmettre le gène de résistance (voir l'article de Patrick Trieu-Cuot p. 62 ).
Les végétaux sont également contaminés, via les fèces animales et humaines. Notre équipe l'a démontré à Toulouse, en nourrissant des volontaires avec une alimentation stérile, pendant un mois. Les bactéries résistantes disparaissent en quelques jours de leurs selles, et ne réapparaissent qu'à l'arrêt du régime stérile(10).
Ainsi, ces résistances ne viennent pas seulement des animaux traités, mais également de tout l'environnement, et en premier lieu des crudités.
Un autre facteur d'apparition de résistance chez l'homme est lié aux antibiotiques eux-mêmes, et non plus aux bactéries.
Ils peuvent en effet laisser des résidus dans la viande ou le lait : une petite partie du produit donné à l'animal passe alors dans l'assiette du consommateur.
Les résidus, s'ils conservaient au moins une partie de leur activité, pourraient exercer une pression de sélection et favoriser l'émergence de résistances. Habituellement, la quantité de résidus dans la viande est quasi nulle, car l'additif est en dose très faible dans l'aliment des animaux, et il est très peu absorbé. Toutefois, lors d'un traitement vétérinaire, la dose thérapeutique est plus élevée et l'antibiotique est davantage absorbé. Il existe donc dans ce cas un délai d'attente légal avant abattage. Si celui-ci n'est pas respecté, il reste des résidus dans la viande.
D'après la Direction générale de l'alimentation, c'est un événement rare : moins d'un prélèvement « positif » sur deux cents, mais à l'échelle du chep-tel national, ce n'est pas négligeable(11).
Pour le lait, les coopératives surveillent de très près les résidus d'antibiotiques (ou « inhibiteurs »).
En effet, la présence de résidus dans le lait d'une seule vache traitée pour mammite peut faire rater la fabrication de fromage ou de yogourt de toute une journée. Ces résidus antibiotiques, même rares, pourraient-ils favoriser les bactéries résistantes dans notre intestin ? Ce risque est évalué, pour chaque antibiotique, avant son autorisation et conduit à fixer des « limites maximales résiduelles ». J'ai étudié l'effet de résidus antibiotiques, chez des volontaires et sur des souris à flore humaine de mon invention(I). D'après nos résultats, les résidus ne présentent pas un grand risque microbiologique.
Il faudrait manger des quantités très importantes de viandes contenant des niveaux illégaux de résidus pour sélectionner des résistances dans notre intestin. Mais, bien que minime, ce danger n'est pas nul.
Même si les preuves directes du risque manquent, peut-on continuer à utiliser largement, pour des raisons économiques, un produit si proche d'un médicament dit « de la dernière chance » ?
L'utilisation d'avoparcine est actuellement suspendue en Europe. L'interdiction d'autres antibiotiques utilisés comme additifs pourrait suivre, et notamment la catégorie entière des macrolides.
En effet, l'érythromycine, un macrolide, est désormais utilisée en clinique humaine.
Or, comme c'est le cas pour la vancomycine et l'avoparcine, des résistances croisées existent entre tylosine (utilisée dans l'élevage) et érythromycine. Les Finlandais ont ainsi déposé en mai 1997 une demande auprès de l'Union européenne pour la faire interdire comme additif, ainsi qu'un autre macrolide, la spiramycine.
Enfin, on commence également à utiliser la pristinamycine à l'hôpital. Elle sert dans les cas désespérés. Or, la pristinamycine est, elle aussi, apparentée à un additif : la virginiamycine.
Les bactéries qui résistent à l'une résistent aussi à l'autre.
Dans les pays nordiques, l'idée se développe ainsi qu'on devrait même interdire les antibiotiques qui ne sont pas du tout utilisés chez l'homme. Car ils serviront peut-être un jour. Il serait regrettable de les avoir « usés » avant, disent-ils. Dans une résolution du 15 mai 1998, le Parlement européen estime aussi qu'il faut « limiter l'utilisation des antibiotiques à des fins purement thérapeutiques ».
En théorie, il est pourtant possible de se passer des additifs, puisqu'ils ne sont pas indispensables à la croissance des animaux, contrairement aux vitamines ou aux oligoéléments. Les Suédois ont ainsi interdit tous les additifs en 1986, il y a donc douze ans. Mais la consommation d'antibiotiques vétérinaires a beaucoup augmenté les années suivantes : plus souvent malades, les animaux devaient être davantage soignés.
Aujourd'hui, les éleveurs suédois ont trouvé d'autres modes d'élevage (moins de protéines dans l'aliment, hygiène plus rigoureuse), mais la viande revient un peu plus cher. Si les additifs étaient interdits à tous les éleveurs européens, le prix de la viande augmenterait sans doute de 5 à 10 %. Ce seraient alors les consommateurs qui en supporteraient les frais.
L'Union européenne, qui devrait uniformiser la réglementation pour le 1er janvier 1999, est donc devant un choix de société.
Le Danemark et la Finlande défendent une position intermédiaire entre la Suède et la France, et n'autorisent que quatre ou cinq molécules. Pour l'instant les pays nordiques font du « lobbying » pour convaincre des effets néfastes des additifs. Ce lobby s'oppose à celui des producteurs d'additifs, qui soulignent que les productions animales de la Suède sont insignifiantes (1 % de la production européenne). L'issue du débat, politique, reste incertaine.
UTILISATION DES ANTIBIOTIQUES CHEZ L'HOMME ET L'ANIMAL
Les additifs représentent une part importante, mais non majoritaire, du marché de l'ensemble des antibiotiques.
Mais certaines familles de molécules sont quasi exclusivement utilisées en alimentation animale.
Elevage et animaux domestiques : lutte contre la résistance aux antibiotiques
Session plénière Agriculture − 12-05-2011 - 12:59Le Parlement demande davantage de recherche et un meilleur suivi des effets des antibiotiques sur les animaux producteurs de denrées alimentaires et sur les animaux domestiques, en vue de faire face à la résistance croissante aux antibiotiques et aux échecs de traitement qui en découlent.
Une moindre utilisation des antibiotiques s'impose, estiment les députés.
La résistance aux antibiotiques est devenue un problème majeur pour l'élevage et les animaux de compagnie, ces dernières années.
Les députés demandent à l'ensemble des États membres d'effectuer une surveillance et un suivi systématiques de la résistance aux antibiotiques (RAM) à la fois au niveau des animaux producteurs de denrées alimentaires et des animaux de compagnie, dans une résolution présentée par Paolo De Castro (S&D, IT), au nom de la commission de l'agriculture, adoptée ce jeudi. Le rapporteur, lors du débat qui a eu lieu mercredi, a déclaré: "utilisés correctement, les antibiotiques sont un outil utile mais nous demandons à la Commission des mesures concrètes en vue d'une utilisation plus efficace des antibiotiques dans le but de réduire la résistance au niveau des animaux", un problème, a-t-il précisé, "qui peut avoir des conséquences pour la santé humaine".
"La résistance aux antibiotiques est en fait la plus grande menace contre la santé animale et la santé humaine. (...) N'oubliez pas que les animaux et les humains à cet égard sont des mammifères", a ajouté Marit Paulsen (ADLE, SE) qui a rédigé le rapport.
Réduire l'utilisation des antibiotiques
Les députés appellent également à élaborer des systèmes d'élevage permettant d'éviter de recourir aux antibiotiques et à développer d'autres recherches sur les nouveaux produits et les méthodes alternatives. Cela permettrait de réduire l'utilisation d'antimicrobiens, tout en contrôlant les maladies animales.
Davantage de contrôles sur les antibiotiques destinés aux animaux pour gérer les effets sur la santé humaine
Les députés ont également demandé de renforcer le budget de l'Office alimentaire et vétérinaire (OAV) et de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) afin de pouvoir effectuer davantage d'inspections et d'analyses dans ce domaine et d'assurer un meilleur suivi de la mise en œuvre de l'interdiction de 2006 des antimicrobiens en tant qu'anabolisants.
Enfin, la Commission est tenue d'élaborer un plan à l'échelle de l'UE en vue de lutter contre la RAM au niveau des animaux de compagnie ainsi que des animaux producteurs de denrées alimentaires et de mettre l'accent sur le lien entre la santé animale et l'utilisation des antimicrobiens et par conséquent sur le lien entre santé animale et santé humaine.
SUITE !! LE CHARBON VEGETAL ?? DESINTOXICATION DE L'ORGANISME !!