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LA SPECULATION SUR LES MATIERES PREMIERES 2011 ?? OU JOUER AVEC LES HABITANTS DE LA TERRE ? FAMINE MONDIALE ??

http://www.latribune.fr/actualites/economie/international/20110520trib000623210/la-speculation-sur-les-matieres-premieres-demythifiee.html

La valeur ajoutée

La spéculation sur les matières premières démythifiée

Source : La Tribune.fr - 21/05/2011
 
Copyright Reuters
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Le récent krach sur les matières premières illustre avec force la nouvelle dynamique endogène des marchés financiarisés. Les fondamentaux n'arrivent plus à expliquer les fluctuations de prix et la compréhension des comportements spéculatifs devient un enjeu majeur.

Après plusieurs mois de flambée des énergies, métaux et denrées, les marchés de matières premières viennent de connaître deux semaines marquées par des chutes de prix brutales sur l'ensemble du secteur. Quelles sont les dynamiques spéculatives sous-jacentes derrière ces mouvements ?

L'investissement dans les matières premières a certes été stimulé depuis un an par les tensions récurrentes sur l'offre mondiale : crise du blé russe dans un premier temps au cours de l'été 2010, printemps arabe depuis janvier 2011 en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, où pas moins de dix pays ont connu un changement de régime, une guerre civile ou des troubles sociaux. Mais une autre dynamique - strictement financière celle-là - se cache derrière l'engouement spéculatif pour les matières. Depuis l'annonce du « quantitative easing 2 » (QE 2) par la Fed pendant l'été 2010, les thématiques spéculatives les plus jouées sur le marché ont été l'achat de matières premières et la vente de dollars. Ces vues sont étroitement connectées : les investisseurs empruntent à court terme en dollars (à un taux d'intérêt maintenu artificiellement bas par la Fed) pour investir simultanément dans les matières premières, les devises émergentes, les devises de pays producteurs de matières premières, l'euro, les actions.

 

Si les investisseurs ont confiance dans la poursuite de la politique laxiste de la Fed et dans la poursuite de la hausse des actifs risqués, le dollar baisse tandis que les actifs risqués financés en dollars augmentent de concert. Une spirale vertueuse de hausse de prix et des positions s'enclenche et un château de cartes de positions spéculatives financées par de la dette à court terme en dollars se construit. Si, au contraire, les actifs financés en dollars fléchissent ou si les investisseurs craignent une hausse des taux d'intérêt de la Fed ou la fin du QE 2, la spirale change de sens : la chute des actifs achetés à crédit oblige les investisseurs à les vendre précipitamment pour rembourser leur dette en dollars, aggravant leur effondrement et provoquant la hausse du billet vert. Des mécanismes de contagion entre actifs financés en dollars se mettent en branle.

L'annonce par le gouverneur de la Banque centrale européenne que les taux de la zone euro ne seraient finalement pas relevés en juin a provoqué une chute importante de la monnaie unique. C'est certainement l'événement déclencheur des débouclages en chaîne frappant matières premières, devises et actions, le 6 mai. Absolument aucune nouvelle fondamentale n'est venue étayer l'effondrement des prix observé sur les matières premières. Si, une semaine après le krach du 6 mai, l'Agence internationale de l'énergie révisait à la baisse la demande mondiale de pétrole, elle alertait néanmoins sur la diminution plus grande encore de l'offre consécutive à l'interruption de la production en Libye et au Yémen.

Ces mécanismes de « physique financière » déconnectés de la « physique de l'offre et de la demande » illustrent la nouvelle dynamique endogène des marchés financiarisés. Les comportements spéculatifs prennent une part de plus en plus importante dans l'évolution des prix. Les facteurs fondamentaux sont certes déterminants pour la fixation des prix sur le très long terme (à l'échelle de la décennie) mais ne parviennent plus à expliquer les fluctuations de prix pourtant d'ampleur considérable sur le court et moyen terme (à l'échelle du mois ou de l'année).

Des supercycles d'investissement sont apparus (caractérisés par une hausse tendancielle des actifs risqués et une baisse tendancielle du dollar), émaillés de fortes secousses de débouclements systémiques. Ceux-ci sont soit ponctuels (comme celui que nous venons de connaître), soit massifs et sauvages (comme celui qui a suivi la bulle du pétrole de 2008).

Les modes d'investissement moutonniers ont bel et bien un impact sur les cours. La compréhension et l'anticipation de ces comportements spéculatifs deviennent un enjeu majeur pour les acteurs économiques soumis aux fluctuations des devises et des matières, mais aussi pour les régulateurs, chargés de les contrôler.

 

Or, des outils existent pour cela. L'analyse des flux d'investissement dans les commodités (via les rapports de la Commodity Futures Trading Commission) permet de dire, par exemple, que les investisseurs ont plus encore investi dans les matières entre 2009 et aujourd'hui qu'ils n'ont investi entre 2006 et le pic de la bulle des matières premières en 2008. La réplication de certaines stratégies d'investissement stéréotypées permet par ailleurs de décrypter le positionnement des acteurs. Des outils sont également disponibles pour évaluer le comportement exagérément régulier des prix : une hausse trop régulière signale en effet un emballement spéculatif (une « bulle ») synonyme d'instabilité. Ainsi, une bulle massive sur l'argent était identifiée avant son éclatement la semaine dernière, doublée de bulles majeures sur un certain nombre de devises (comme le real brésilien ou le dollar australien) et d'une bulle significative sur le complexe pétrolier. En outre, l'analyse des relations des dépendances entre les actifs permet de mieux anticiper l'enchaînement des scénarios susceptibles de se produire au cas où une bulle locale implose. Ce type d'analyse permettait, par exemple, de prévoir que l'implosion de la bulle de l'argent ou du pétrole ne serait pas sans conséquence sur des marchés connexes également très présents dans les portefeuilles des investisseurs, comme les métaux de base ou les actions.

La modélisation probabiliste a jusqu'à présent mobilisé l'essentiel des efforts des chercheurs et des spécialistes de la gestion des risques. Or, ces modèles sont inopérants dans les phases extrêmes de marché où les interactions des acteurs prédominent. Il importe maintenant de décrypter ces interconnexions pour imaginer leurs effets sur les marchés.

Steve Ohana, professeur à l'ESCP Europe et Thomas Porcher, professeur à l'ESG-MS - 21/05/2011, 21:48 |
 

  • Armand a écrit le 12/06/2011 à 08:42 :

    • Un grand nombre de matières premières non cotées et donc non accessibles aux spéculateurs (minerai de fer, zircon, terres rares, charbon métallurgique...) ont bien plus progressé en termes de prix que les matières premières cotées comme le pétrole, le blé ou bien le cuivre. Les spéculateurs apportent de la volatilité mais ils ne changent pas la tendance de fond. Ouvrir une nouvelle mine ou bien démarrer une nouvelle plateforme pétrolière est de plus en plus difficile alors que la demande émergente poursuit sa lame de fond.

      http://lexpansion.lexpress.fr/economie/speculation-sur-les-matieres-premieres-sarkozy-a-t-il-raison_247661.html

      Spéculation sur les matières premières: 

      Sarkozy a-t-il raison?

      Par Laura Raim - publié le 25/01/2011 

      Le président de la République a vivement critiqué une étude de Bruxelles mettant en doute l'impact de la spéculation sur la hausse des prix agricoles. Qu'en est-il vraiment? L'avis du sociologue et anthropologue Paul Jorion.

      Entre deux tiers et 90% des transactions sur le marché à terme des matières premières émanent de spéculateurs
      Entre deux tiers et 90% des transactions sur le marché à terme des matières premières émanent de spéculateurs
      Reuters / Frank Polich

      "L'étude montrant que la spéculation ne conduit pas à l'augmentation du prix des matières premières au niveau mondial, je recommanderais une date pour la publier, le 1er avril", s'est emporté Nicolas Sarkozy lors d'une conférence de presse lundi. C'est sûr que le rapport de Bruxelles tombe mal alors que le chef d'Etat fait de la lutte contre la spéculation sur les matières premières agricoles l'un de ses chevaux de bataille pour sa présidence du G20. Encore faut-il s'entendre sur la définition de la spéculation et en comprendre les mécanismes. Les explications de Paul Jorion, sociologue et anthropologue.

      Comment spécule-t-on sur les produits agricoles ?

      La spéculation se déroule sur les marchés "futures" ou à terme, c'est-à-dire où les intervenants fixent un prix aujourd'hui pour une transaction qui interviendra dans quelques mois. A l'origine, cela devait permettre aux négociants de se couvrir contre les variations de prix. Mais aujourd'hui, entre deux tiers et 90% des transactions émanent de spéculateurs. Il faut distinguer deux approches spéculatives : les investisseurs "longs" et les traders opportunistes. Les premiers achètent en général des parts dans des "fonds longs" constitués de "paniers" de matières premières, comprenant en particulier des produits agricoles et misent sur une hausse à long terme des prix, comptant sur des facteurs structurels comme l'accroissement de la demande chinoise. Ces investisseurs peuvent notamment venir sur le marché des matières premières pour se couvrir contre une baisse du dollar. Cette stratégie de long systématique génère une tendance à la hausse des cours.

      La deuxième catégorie est celle des traders opportunistes qui entrent et sortent en permanence du marché pour profiter des changements de prix. Ils alternent ainsi positions acheteuses (long) et vendeuses (short) selon que les prix montent ou baissent.

      Nicolas Sarkozy a évoqué lundi un opérateur qui avait acheté 15% des stocks mondiaux de cacao...

      Oui : Anthony "Chocfinger" Ward ! Là il ne s'agit pas à proprement parler de spéculation mais d'accaparement. Le "négociant", comme on appelle celui qui dispose véritablement du produit ou est capable d'en prendre livraison ne fait pas un pari en achetant ou en vendant des contrats sur le marché à terme mais intervient directement sur le marché physique. S'il y a par exemple un problème climatique qui va peser sur l'offre du cacao, le négociant a intérêt à acheter et stocker un gros volume pour réduire encore plus l'offre et faire monter les prix avant de revendre. Aujourd'hui, certains fonds d'investissements font aussi bien de l'accaparement que de la spéculation. On sait maintenant que la banque d'investissement américaine Bear Stearns par exemple faisait les deux sur le marché de l'argent en 2008.

      Un rapport de Bruxelles affirme qu'il n'y pas de lien probant entre l'activité des marchés de produits dérivés et l'augmentation des prix.

      En théorie les prix à terme n'ont pas d'impact sur les prix comptant, mais dans la pratique, les prix comptant ou "spot" s'alignent de facto sur les prix à terme : si la spéculation fait monter les prix à terme, cette hausse se répercute immédiatement sur le prix comptant. Ceci s'explique par une croyance dans le fait que les marchés à terme seraient rationnels, omniscients et qu'ils sauraient anticiper ce qui va se passer. Pour caricaturer : si le prix à terme est élevé, cela veut dire que le marché à terme sait qu'il y aura pénurie, et alors le prix comptant monte lui aussi pour refléter cette donne. Or on voit bien que parfois les prix ne reflètent pas du tout l'offre et la demande. Quand en 2008, le pétrole est passé en six mois de 84 à 145 dollars le baril, cela n'avait aucun rapport avec les fondamentaux puisque la récession avait fait chuter la demande.

      Les défenseurs de la spéculation arguent qu'elle a le mérite de favoriser la liquidité...

      C'est l'éternel argument des partisans de la dérégulation. Et c'est vrai ! Mais quel intérêt si cette liquidité existe à un prix spéculatif qui n'a rien à voir avec l'offre et la demande ? De toute façon, la liquidité accrue offerte par la présence d'un spéculateur sert surtout à un autre spéculateur. S'il y a moins d'acteurs sur le marché, cela prendra effectivement un peu plus de temps pour qu'acheteurs et vendeurs s'accordent sur un prix, et alors ?

      Parmi ses pistes de régulation, Sarkozy veut accroître la transparence sur le marché physique et obliger les acheteurs à avancer une plus grosse somme.

      Améliorer la transparence c'est bien mais cela n'empêchera pas la spéculation. Exiger des garanties financières plus importantes aurait le mérite de réduire le nombre de gens qui ont les moyens de participer. Les partisans de la libéralisation à outrance soutiendront que c'est antidémocratique, mais ce serait une première étape positive parce que cela découragerait de participer à ces marchés ceux qui ne sont pas d'authentiques "négociants", capables de livrer ou de prendre livraison du produit. 

      Suite !! 



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