ECHANGE TRAVAIL CONTRE NOURRITURE ? RETOUR ESCLAVAGISME ?? LES ENFANTS BRITANNIQUES ONT FAIM ?

PORTUGAL  Echange travail contre nourriture

 
A la faveur de la crise, de plus en plus de Portugais dans le besoin se mettent en situation de semi-esclavage. António et Lídia sont de ceux qui échangent leurs bras contre une aide en nature.
Dessin de Sampaio, Portugal.
Dessin de Sampaio, Portugal.Droits réservés

Dans les petites annonces publiées sur Internet, on voit de plus en plus de gens désespérés demander du travail en échange de nourriture. Ils sont prêts à tout. "On est en train d'assister à une régression civilisationnelle. Avec la crise, les cas de semi-esclavage augmentent", note Joaquim Dionísio, avocat spécialiste du droit du travail et membre de la direction de la CGTP [le principal syndicat portugais].

A 24 ans, António Santos a tout perdu. D'abord son emploi, puis le logement où il vivait à Matosinhos [ville située à l'ouest de Porto]. En octobre dernier, il s'est retrouvé au chômage sans droit à une allocation. L'argent économisé lorsqu'il travaillait dans le BTP et la restauration lui a permis de payer cinq mois de loyer. Sans revenus ni aides financières, il a donc dû quitter son appartement en février. Les bons jours, il dort sur le canapé chez des amis, les mauvais dans une cabane en carton.

"Je fais des choses ici ou là pour ne pas mourir de faim. Mais j'ai vraiment besoin de travailler, même si c'est seulement en échange de nourriture et d'un endroit où dormir", soupire le jeune homme, qui a une formation professionnelle en commerce. C'est ce qu'il a écrit dans les annonces qu'il a mises en ligne en mars sur plusieurs sites. Bien qu'il ait proposé de travailler gratuitement, il n'a reçu aucune réponse. Tout du moins jusqu'à fin avril, la dernière fois qu'il a pu aller sur Internet. "Je n'ai même pas assez d'argent pour aller dans un cybercafé", explique António. Il peut compter pour l'instant sur la solidarité de ses amis qui lui offrent un repas par jour et lui prêtent des habits "pour être plus présentable". Avec l'espoir de trouver un jour un emploi.

Des situations fragiles qui favorisent les exploiteurs

S'il n'y a pas de données précises sur le nombre de Portugais prêts à travailler sans être payés en retour, la dernière enquête sur l'emploi de l'INE [l'équivalent de l'Insee] évoque le chiffre de 32 000 travailleurs non rémunérés pour le premier trimestre 2012. Un nombre qui correspond uniquement à ceux qui travaillent de manière informelle pour un membre de la famille.

Tous les autres cas échappent aux statistiques, et sont a fortiori illégaux. "Il ne peut y avoir de contrat sans rétribution en argent. Sinon, c'est de l'esclavage. Le Code du travail prévoit l'existence de rétributions en nature mais uniquement si elles n'excèdent pas la part pécuniaire", explique Fausto Leite, spécialiste en droit du travail. "Les abus sont quotidiens. Dans la pratique, on trouve de tout. Ces cas sont symptomatiques d'un désespoir criant", ajoute-t-il. Une opinion partagée par Joaquim Dionísio, qui rappelle les milliers de Portugais "vivant dans l'angoisse, sans aucun revenu". Selon les derniers chiffres de la Sécurité sociale, près de 300 000 demandeurs d'emploi n'ont pas d'allocations de chômage. "De nombreux employeurs profitent de cette énorme fragilité pour les exploiter."

Parmi les gens qui demandent de la nourriture en échange de travail, on ne trouve pas que des chômeurs. Lídia Joaquim, 38 ans, travaille plus de huit heures par jour en faisant des ménages et en prenant soin d'une personne handicapée. Mais les 485 euros mensuels [l'équivalent du smic local] ne suffisent pas. Avec les 300 euros de loyer – un appartement exigu à Ramada [ville dans la banlieue nord de Lisbonne] – et les dépenses en eau, électricité et gaz, il lui reste 30 euros pour nourrir ses deux enfants, âgés de 15 et 18 ans. "On ne fait plus de petit déjeuner ni de goûter. Et si, le soir, le poulet ne suffit pas pour nous trois, je leur donne ma part et je me contente du riz", raconte-t-elle. 

Acheter un cahier… ou du pain

Par ailleurs, Lídia et ses enfants ont également perdu une partie de la réduction à laquelle ils avaient droit, quand les tarifs dans les transports en commun ont augmenté. Sa fille Mariana doit aller à pied à l'école, soit une heure et demie de marche. L'argent suffit seulement à payer la carte de transport d'Adilson, le plus grand, scolarisé dans un lycée éloigné de l'appartement. "Si j'achète une carte de transport, pas de yaourts. Si j'achète un cahier, pas de pain."

Arrivée d'Angola il y a dix ans, Lídia est asphyxiée financièrement. Cette situation l'a poussée à publier une annonce en février proposant de s'occuper d'enfants ou de personnes âgées, ou bien de faire du ménage en échange de nourriture. "Si je nettoie des escaliers et qu'on me donne un paquet de riz, je me sentirai mieux. Je pourrais aussi aller voir une association et demander de l'aide, mais je suis en bonne santé et j'ai assez de force pour travailler", explique-t-elle.

Le président de l'União das Misericórdias [le principal réseau caritatif du pays], Manuel Lemos, comprend le refus de la charité et loue la volonté de travailler. Mais cela ne peut pas se faire en échange de nourriture, selon lui. Des cantines sociales sont présentes dans tout le pays et "ont pour mission de venir en aide à tous ceux qui sont dans le besoin". A l'instar d'António et Lídia.

 

http://www.courrierinternational.com/article/2012/11/22/stop-a-l-austerite

 

 http://www.courrierinternational.com/article/2012/09/21/vu-d-inde-les-enfants-britanniques-ont-faim

EUROPE  Vu d'Inde, les enfants britanniques ont faim

Un journaliste indien s'étonne que les enfants du Royaume-Uni souffrent de plus en plus de la pauvrété, et que le gouvernement ne fasse rien pour y remédier.

 Page d'accueil internet de la campagne britannique de Save the children.

Alors que le Royaume-Uni se flatte d'être la septième puissance économique mondiale et d'envoyer des milliards d'euros d'aide à d'autres pays, dont l'Inde, certains s'interrogent: que fait-on pour lutter contre la pauvreté au Royaume-Uni, où un nombre croissant de personnes souffrent de la faim, du chômage et de l'absence de logements ?

Signe de la gravité de la situation après quatre dures années de récession, l'ONG Save the Children – réputée pour son travail en Asie, en Afrique et en Amérique du Sud – lance pour la première fois un appel national pour venir en aide aux pauvres du Royaume-Uni, qui se voient infliger une sorte de double peine avec une récession économique doublée d'un plan de rigueur gouvernemental très controversé.

Le rapport de l'ONG Save the ChildrenDans cette campagne, signée du slogan "It shouldn't happen here" [cela ne devrait pas arriver ici], l'ONG révèle que le Royaume-Uni abrite près de 3,5 millions d'enfants pauvres, dont 1,6 million vivraient dans une extrême pauvreté.

"Il est inacceptable de voir qu'en 2012, des familles vivant au Royaume-Uni doivent se priver de biens essentiels, notamment alimentaires, ou se retrouver criblées de dettes uniquement pour subvenir à leurs besoins quotidiens", déclare l'organisation humanitaire en soulignant que les enfants les plus pauvres sont les premières victimes de la récession économique.

Le responsable exécutif de Save the Children, Justin Forsyth, indique que la pauvreté a progressé depuis l'élection du gouvernement conservateur qu'il incite à faire davantage pour épargner de nouvelles restrictions budgétaires aux catégories "les plus pauvres et les plus défavorisées". L'ONG, dont les campagnes mettent plus souvent en scène des enfants africains affamés, a cette fois choisi l'image d'une petite fille blanche en larmes, avec comme bandeau: "aujourd'hui au Royaume-Uni, 1,6 million d'enfants vivent dans une extrême pauvreté", suivi du slogan: "Cela ne devrait pas arriver ici".

C'est pourtant bien ce qui arrive. Et la situation ne devrait qu'empirer dans les années à venir. Pendant ce temps, le gouvernement dépense des millions d'euros pour une somptueuse campagne d'affichage visant à redonner sens au "grand" de "Grande Bretagne"

Note :

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